C’est officiel, le logement trouve un nouvel acteur en la personne de Guillaume Kasbarian, député et président de la commission des Affaires économiques. Alors que la construction est dans une impasse et que la filière immobilière est en grande difficulté, le ministre hérite de dossiers brûlants. Entre attentes et controverses, son mandat s’annonce déjà comme un défi colossal pour l’avenir du logement en France. Au sommaire :
Qui est le nouveau ministre du Logement ?
Guillaume Kasbarian, diplômé de l’Essec et ancien consultant en cabinets de conseil, a plongé dans le monde politique en 2016 pour soutenir Emmanuel Macron. Il est devenu député l’année suivante et a été réélu en 2022, accédant ensuite à la présidence de la commission des Affaires économiques de l’Assemblée nationale. Peu de temps après, il s’est fait remarquer pour sa proposition de loi, en collaboration avec Aurore Bergé, visant à lutter contre l’occupation illégale des logements, communément appelée la loi « anti-squat » [source : lesechos.fr]. À 36 ans, ce jeune député Renaissance d’Eure-et-Loir est donc devenu ministre délégué en charge du Logement et succède donc au ministre sortant, Patrice Vergriete, qui ne sera resté que 6 mois à ce poste. Sa nomination fait déjà débat, voire est une véritable » provocation » au sein de la gauche, avec de nombreuses réactions à ce sujet.
Réactions des acteurs de l’immobilier et de la classe politique
Parmi le florilège de commentaires suite à cette nomination, certains m’ont attirés l’attention plus que d’autres. Christophe Demerson, directeur de la publication « 25 millions de propriétaires » et ex-Président UNPI France, déclare que le DPE est le chantier prioritaire :
Félicitons-nous de la nomination de Guillaume Kasbarian au logement. Il connaît bien le secteur comme son courage nous a permis d’avancer sur le délicat dossier des squat. Chantier prioritaire majeur : Le DPE qui permettra de débloquer beaucoup dans le neuf et dans l’ancien.
Pour Norbert Fanchon, Président du Groupe Gambetta, il n’y a pas de temps à perdre :
Le nouveau ministre Guillaume Kasbarian aura fort à faire avec une construction neuve en berne, les mises en chantier sont historiquement bas. Il devra d’abord rebooster la demande soit par un super PTZ soit un nouveau Pinel. L’offre sera pour après.
Christophe Robert, délégué général de la Fondation Abbé Pierre, souhaite alerter le nouveau ministre concernant la remise en cause de la loi SRU :
Les annonces du Premier ministre qui consistent à remettre en cause la loi SRU inquiètent profondément au sein du Pacte du pouvoir de vivre, alliance de la société civile initiée le 5 mars 2019 par la CFDT avec 18 autres organisations.
Mathilde Panot, députée du Val-de-Marne et Présidente du groupe LFI à l’Assemblée nationale, a réagit en parlant de « provocation » :
Kasbarian ministre du Logement ? Une provocation !En 10 ans, le nombre de personnes sans-abris a doublé. Le nombre d’enfants à la rue explose. Nommer celui dont le seul fait d’armes est d’avoir facilité les expulsions est un crachat aux visages des 4 millions de personnes mal logées et 330 000 personnes sans-abris.
Pour Tonino Serafini, ex-journaliste spécialisé immobilier et logement, et Pascal Brice, président de la fédération des acteurs de la solidarité, cette nomination est dans la lignée des précédentes et confirme une politique qui stigmatise les pauvres. Tonino Serafini explique d’ailleurs que :
La nomination de Guillaume Kasbarian au ministère du Logement consacre politiquement la criminalisation de la pauvreté. Sa PPL anti-squat prévoyait 6 mois de prison contre les locataires en impayé de loyer qui restaient dans leur logement après un jugement d’expulsion définitif. L’article de sa PPL criminalisant les locataires en difficulté avait finalement été supprimé suite aux protestations des associations de lutte contre les exclusions et une bataille menée par la gauche au Sénat et l’Assemblée. Guillaume Kasbarian avait défendu mordicus cet article. Le logement est un révélateur de l’orientation politique d’un gouvernement. En 2017, après son élection, le Président Macron avait fait voter une loi de finances qui « en même temps » supprimait l’ISF pour les + riches, baissait l’APL pour les + pauvres et ponctionnait les HLM.
Un procès d’intention ?
Guillaume Kasbarian prend donc les rênes du ministère du Logement dans un contexte critique. Entre défis immédiats et attentes de réformes à long terme, son mandat sera scruté de près. La question que je me pose est la suivante : est-ce que le fait d’avoir enfin une personne en responsabilité au logement doit lui laisser le bénéfice du doute ?Je constate que beaucoup de professionnels sont outrés de cette nomination et le « passif » de Guillaume Kasbarian ne joue pas en sa faveur, mais avant de lui tomber dessus il faudrait d’abord l’inciter à parler avec tous les acteurs de l’immobilier. La balle serait alors dans son camp et nous aurons alors tout le loisirs de dire ce que nous en pensons !