Logement et location : peut-on vraiment revaloriser un loyer après avoir réalisé des travaux énergétiques ?

Par Cyril KUHM le 04 juillet 2025 à 08:00

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Logement et location : peut-on vraiment revaloriser un loyer après avoir réalisé des travaux énergétiques ?

Mener des travaux de rénovation énergétique dans un logement en location soulève de nombreuses interrogations, notamment sur la possibilité d’ajuster le montant du loyer. De nombreux bailleurs cherchent à comprendre dans quelles conditions une revalorisation est légale et comment s’organiser face à la réglementation qui encadre strictement ces hausses. Distinguer la zone géographique du bien, la nature précise des travaux ou encore les modalités d’application peut faire toute la différence pour optimiser, sans embûches, la gestion locative.

Dans quels cas peut-on augmenter le loyer après des travaux ?

La tentation d’augmenter le loyer après avoir investi dans la performance énergétique est compréhensible.

Pourtant, il ne suffit pas d’effectuer quelques aménagements pour pouvoir relever le montant perçu.

Tout commence par l’analyse de deux critères essentiels : la présence d’une clause spécifique dans le bail initial et la situation du bien, qu’il se trouve en zone tendue ou non.

À Paris, Lyon, Bordeaux ou toute agglomération dite “tendue”, le dispositif reste plus strict qu’ailleurs.

Même avec des travaux importants, il faudra prouver que le loyer précédent était inférieur à la moyenne locale pour envisager une réévaluation.

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Cette sous-évaluation doit être démontrée en comparant au moins trois logements similaires situés à proximité.

Le cas particulier de la clause dans le bail

Insérer dès la signature du bail une clause prévoyant une augmentation liée à de futurs travaux permet de sécuriser juridiquement l’opération.

Si cette mention existe, une hausse devient envisageable dès la fin des travaux – mais attention, seule une amélioration notable justifie légalement cette démarche, jamais une simple réparation ou une remise en état ordinaire.

Cette anticipation contractuelle apporte aussi une transparence bienvenue pour le locataire, qui n’est ainsi jamais pris au dépourvu par la nouvelle grille tarifaire.

Spécificités des zones détendues

Hors des grandes métropoles dites “tendues”, la réglementation paraît plus souple en apparence.

En réalité, elle repose sur un principe identique : impossible d’augmenter un loyer s’il correspond déjà au niveau du marché local.

Le propriétaire conserve la main uniquement s’il démontre que le loyer pratiqué était vraiment bas.

Là encore, cela implique une comparaison chiffrée avec au moins trois offres équivalentes situées à proximité.

On constate donc que la zone géographique impacte surtout les procédures, rarement leur fondement.

Que votre appartement soit à Limoges ou Marseille, l’évaluation comparative demeure une étape incontournable.

Quelles limites chiffrées et quelles règles d’application ?

Le cadre légal encadre fortement les hausses de loyer, évitant ainsi que chaque rénovation ne devienne une opportunité de surfacturation.

Le calcul suit plusieurs plafonds précis pour protéger locataires et bailleurs.

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En cas de travaux améliorant la performance globale (isolation, chauffage, remplacement de fenêtres…), deux limites s’appliquent.

  • Premier plafond : 15 % du montant TTC des travaux, si ceux-ci valent au moins douze mois de loyers cumulés.
  • Deuxième plafond : 50 % de la différence entre le loyer d’origine et celui des annonces repérées chez trois voisins offrant un confort comparable.

C’est toujours la limite la plus avantageuse qui prévaut pour le bailleur, sans excéder aucun des deux plafonds. Cela assure une progression modérée malgré l’effort financier consenti lors de la modernisation du logement.

Exemple pratique de calcul

Prenons un appartement loué 500 € par mois, pour lequel 6 000 € de travaux ont été engagés (TTC).

L’application du premier plafond donne droit jusqu’à 900 € d’augmentation annuelle (soit 75 € par mois).

Même résultat si le second critère fournit un relèvement supérieur : c’est lorsqu’un inventaire local démontre une sous-évaluation flagrante.

Ce supplément ne peut cependant pas être appliqué intégralement dès la première échéance.

Si la hausse représente plus de 10 % du loyer initial, la loi impose un étalement du nouveau montant sur six ans : le loyer augmentera d’abord d’un sixième, puis d’un second sixième l’année suivante, etc.

Pour une hausse inférieure, une répartition sur trois ans est prévue.

Loyers meublés et nouvelles locations

Pour les baux meublés, l’étalement progressif concerne uniquement les hausses dépassant 10 % du prix initial.

Dans le cadre d’une relocation, si le logement bénéficie de travaux d’amélioration majeurs (plus de la moitié d’un an de loyer investi), le futur loyer pourra immédiatement grimper de 15 % de la facture.

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Dès lors que le seuil correspondant à une année complète de loyer investi est franchi, le propriétaire n’a plus aucune contrainte quant au montant du nouveau bail.

L’adaptation est alors nettement plus marquée que lors d’un simple renouvellement avec le même occupant.

Les propriétaires doivent cependant veiller à informer clairement le locataire lors de la fixation du montant afin d’éviter tout litige.

Quels recours si le locataire refuse la nouvelle proposition ?

Même en respectant scrupuleusement la loi, rien n’oblige le locataire à accepter la modification proposée, surtout si celle-ci impacte ses finances.

Lorsqu’un désaccord persiste ou que le silence s’installe pendant quatre mois, l’affaire devra être portée devant la commission départementale de conciliation.

Cet organisme tente alors de trouver une solution amiable avant d’envisager une procédure judiciaire.

Au-delà du dialogue, conserver une trace de chaque étape (devis, factures de travaux, études de marché) reste indispensable pour défendre ses droits en cas de conflit.

Ce réflexe réduit également les risques d’annulation d’une hausse pourtant justifiée selon la réglementation.

Conseils pratiques pour anticiper et réussir une augmentation de loyer liée aux travaux énergétiques

Face à la complexité croissante des textes, élaborer une stratégie claire fait toute la différence.

Avant de lancer un chantier, il est judicieux d’étudier la rentabilité attendue et de vérifier les références actuelles des loyers alentour afin de préparer sereinement une éventuelle demande de révision.

Par ailleurs, consulter un professionnel de l’immobilier ou un avocat spécialisé aide souvent à rédiger correctement la future clause du bail ou à choisir le meilleur plan de communication avec le locataire.

Mieux vaut prévoir tous les justificatifs nécessaires, de la simulation des gains énergétiques au relevé détaillé des dépenses engagées.