Le récent rapport du Conseil d’analyse économique (CAE) soulève des doutes sur l’efficacité des milliards d’euros investis dans le Diagnostic de Performance Énergétique. Les rénovations énergétiques, longtemps encouragées, pourraient ne pas refléter la réalité énergétique des logements français. Actual Immo a analysé toutes les informations à disposition pour que vous puissiez faire votre propre jugement. Au sommaire :
Les limites du Diagnostic de Performance Énergétique
Depuis l’adoption de la Loi climat et résilience, les investissements dans la rénovation énergétique des logements en France ont augmenté d’année en année pour arriver à 8,2 milliards d’euros. L’État a d’ailleurs estimé arriver à 11,2 milliards d’euros d’investissement sur l’année 2024. Rappelons qu’en 2019, c’était près de 3,9 milliards d’euros de dépense. Pour savoir quels sont les logements ayant besoin d’aide à la rénovation, l’État utilise un indicateur : le Diagnostic de Performance Énergétique (DPE). Obligatoire depuis 2006 et modifié en juillet 2021, ce DPE est un indicateur utilisé pour évaluer quelles sont les fameuses passoires thermiques (logements notés F et G) et quand ces dernières doivent être retirées du marché immobilier. Or, un rapport du Conseil d’analyse économique (CAE) remet en question l’efficacité du DPE, pointant du doigt des écarts significatifs entre les prévisions théoriques et la réalité de la consommation énergétique des ménages à cause principalement de 3 raisons :
Ce rapport, issu de données bancaires de 180 000 ménages du Crédit Mutuel Alliance Fédérale, est donc un document à charge de plus contre la méthode de calcul du DPE et met en lumière des incohérences entre les classifications énergétiques et les dépenses réelles des ménages : « Les logements présentés comme les moins énergivores dépensent près de deux fois plus d’énergie que prévu, alors que les plus énergivores, deux fois moins » [source : epochtimes.fr]. Autre point qui ressort de ce rapport, c’est l’impact des facteurs sociodémographiques sur les dépenses énergétiques :
Il est intéressant de noter que des facteurs sociodémographiques, comme le revenu ou l’âge, expliquent autant, voire davantage les variations de dépenses énergétiques que la performance énergétique prédite par le DPE. Ainsi, la dépense énergétique varie du simple au double entre un ménage à revenu médian (10e vingtile) et un ménage du dernier vingtile. Elle est 40 % plus élevée entre un ménage de moins de 25 ans (12,44 €/m2/an en AB) et un ménage de plus de 65 ans (17,35 €/m2/an en AB).
En résumé : plus vous avez les moyens et êtes « senior », plus vous dépensez en énergie !
Les enseignements du modèle Allemand
Sur les questions de compétitivité, la France se compare souvent à l’Allemagne. Alors regardons de plus près ce qu’il se passe concernant la transition énergétique d’outre-Rhin. Pour répondre à cette question, Andreas Rudinger, chercheur au programme énergie-climat et Coordinateur Transition Energétique France à l’IDDRI, a publié un billet de blog le 13 janvier 2021 [source : iddri.org]. Cela ne date pas d’hier mais est hautement intéressant et offre une lecture différente de celle du célèbre article du 4 octobre 2020 du Monde. Andreas Rudinger revient sur les 2 principaux « faits » mis en avant dans l’article du Monde :
L’article va d’ailleurs plus loin en évoquant les résultats de 350 rénovations énergétiques performantes dans des immeubles locatifs :
Vers une refonte du DPE ?
Les conclusions du CAE ne font qu’accentuer les doutes déjà existants sur le DPE. Ces résultats remettent donc en question la classification de A à G des logements les moins énergivores aux plus énergivores, mis en place par le gouvernement pour suivre la feuille de route de Bruxelles. Concernant les enseignements de l’expérience allemande et à la lecture des propos d’Andreas Rudinger, je pense qu’il serait opportun de regarder plus en détail ce qu’il se passe du côté de nos voisins allemands, avec, soyons fou, la possibilité de s’inspirer de ce qui fonctionne !Cela n’enlève évidemment rien à la problématique concernant le DPE car je reste convaincu qu’il faut s’appuyer sur des données plus réalistes et efficaces, tout en garantissant un accès équitable au logement.
La vidéo sur ce sujet
Je vous invite à regarder cette vidéo :