« La plus haute tour en bois s’effondre » : l’inflation tue un rêve américain

Par Baptiste BIALEK le 01 octobre 2025 à 06:45

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« La plus haute tour en bois s’effondre » : l’inflation tue un rêve américain

À Milwaukee, un projet architectural hors norme attire l’attention mondiale : une tour en bois de 375 pieds, censée devenir la plus haute jamais construite. Mais son avenir semble déjà menacé.

Neutral 1005 N Edison St, une tour en bois hors norme

Un gratte-ciel qui devait battre tous les records

Le projet Neutral 1005 N Edison St devait symboliser une nouvelle ère. Avec ses 31 étages et ses 350 logements, il promettait de dépasser la tour Ascent, actuelle référence en matière de gratte-ciel en bois. Au-delà du logement, il devait intégrer commerces, salle de sport et espaces médicaux.

Sa hauteur, 114,3 mètres, aurait marqué un tournant dans l’histoire de la construction durable. Les promoteurs souhaitaient prouver qu’un matériau traditionnel pouvait rivaliser avec le béton et l’acier dans des projets d’envergure mondiale.

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Les matériaux innovants utilisés pour sa construction

La structure repose sur du bois lamellé-croisé (CLT) et du bois lamellé-collé (glulam). Ces technologies modernes garantissent une solidité exceptionnelle et une empreinte carbone réduite. Le cœur du bâtiment, abritant ascenseurs et escaliers, reste toutefois en béton pour assurer la stabilité.

Ce choix illustre un mouvement mondial : utiliser le bois massif comme réponse aux défis climatiques. Il combine esthétique, performance et durabilité, tout en réduisant l’impact environnemental des grands chantiers urbains.

L’ambition initiale était claire : bâtir un gratte-ciel emblématique qui incarnerait à la fois l’innovation architecturale et la transition écologique. Pourtant, la réalité économique est venue bouleverser cette trajectoire.

La suite du chantier pose désormais une question cruciale : l’écologie peut-elle résister aux contraintes financières dans un projet de cette ampleur ?

Quand l’inflation bloque un chantier emblématique

Des coûts qui explosent malgré les ambitions écologiques

Alors que les défis techniques semblaient sous contrôle, c’est le poids financier qui menace l’avenir du projet. L’inflation dans le secteur du bâtiment aux États-Unis a provoqué une hausse des prix des matériaux, du transport et de la main-d’œuvre.

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Résultat : un chantier pensé comme vitrine écologique devient difficilement soutenable. Le budget initial, déjà ambitieux, ne peut plus absorber ces hausses répétées. Les investisseurs s’interrogent désormais sur la rentabilité de l’opération.

Le PDG de Neutral, Nate Helbach, reconnaît que « faire une pause pour réévaluer les coûts est une décision difficile mais prudente ». Une manière d’admettre que le rêve ne peut se poursuivre sans ajustements majeurs.

Les stratégies de réduction des dépenses envisagées

Pour sauver le projet, Neutral collabore avec C.D. Smith Construction. Ensemble, ils mènent un travail de « value engineering » visant à repenser chaque étape de la construction pour réduire les coûts sans compromettre la sécurité.

Plusieurs pistes sont étudiées : choix de fournisseurs locaux, adaptation du calendrier de travaux ou remplacement de certains composants par des alternatives moins coûteuses. L’objectif reste clair : maintenir l’ambition écologique tout en retrouvant une viabilité financière.

Cette situation illustre une réalité fréquente : même les projets les plus innovants doivent composer avec les contraintes économiques. La question est désormais de savoir si ces ajustements suffiront à éviter l’abandon pur et simple du chantier.

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Quel avenir pour les gratte-ciel en bois ?

Un signal pour l’industrie de la construction durable

L’arrêt temporaire de Neutral 1005 N Edison St envoie un message clair au secteur : l’innovation ne suffit pas sans équilibre financier. Les tours en bois suscitent l’intérêt pour leurs atouts écologiques, mais les risques économiques restent élevés.

Si ce projet échoue, il pourrait freiner l’élan mondial autour du bois massif. À l’inverse, sa réussite offrirait une vitrine à d’autres initiatives similaires aux États-Unis, en Europe et en Asie.

La situation met en lumière une tension constante : comment concilier durabilité et rentabilité dans les grandes métropoles où chaque mètre carré compte ?

Le défi de conjuguer écologie et viabilité économique

Le bois massif séduit par son faible impact carbone et son image moderne. Mais son prix, combiné à la volatilité des marchés, constitue un frein majeur. Les constructeurs devront trouver de nouveaux modèles économiques pour pérenniser cette voie.

Des solutions émergent déjà : coopérations publiques-privées, subventions vertes ou industrialisation accrue de la filière. Ces leviers pourraient rendre ces projets plus compétitifs face au béton et à l’acier.

En définitive, Milwaukee devient un laboratoire. L’avenir de cette tour dépassera son seul chantier : il déterminera la crédibilité mondiale des gratte-ciel en bois et leur place dans l’architecture durable de demain.