Loyer à 1 euro par mois : enquête sur le village le plus inaccessible d’Europe

Par Baptiste BIALEK le 17 décembre 2025 à 06:45

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Loyer à 1 euro par mois : enquête sur le village le plus inaccessible d’Europe

Un village où le loyer coûte moins d’un euro par mois existe réellement en Europe. Derrière cette promesse fascinante se cache pourtant un système ancien, très encadré, qui soulève aujourd’hui de vraies questions sur l’accès au logement et la solidarité moderne.

Un village à 1 euro par mois qui fascine l’Europe

Le Fuggerei un modèle social unique depuis le XVIe siècle

Créé en 1521 à Augsbourg, le Fuggerei est considéré comme le plus ancien ensemble de logements sociaux encore en activité. Son fondateur, Jakob Fugger, souhaitait offrir un habitat digne à des personnes pauvres mais jugées « respectables » selon les critères de l’époque.

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Cinq siècles plus tard, le principe reste intact. Les résidents paient l’équivalent de moins d’un euro par mois, un montant symbolique qui intrigue et nourrit régulièrement l’actualité européenne.

Pourquoi ce loyer symbolique existe encore aujourd’hui

Le fonctionnement du village repose sur une fondation privée dotée d’un patrimoine financier conséquent. Les revenus issus des placements et du tourisme permettent d’entretenir les logements sans dépendre des aides publiques.

Cette autonomie garantit une stabilité rare dans un contexte de crise du logement. Le modèle est souvent cité comme un exemple de solidarité durable, capable de traverser les siècles sans renier ses principes fondateurs.

Mais cette fidélité absolue à l’histoire a un revers. En conservant des règles figées, le village attire autant qu’il interroge, notamment sur sa capacité à répondre aux formes modernes de précarité.

Ce paradoxe explique pourquoi le Fuggerei est à la fois admiré, visité et critiqué. Il incarne une réussite patrimoniale, mais aussi une vision très encadrée de la solidarité sociale.

Qui peut vraiment vivre dans un village à 1 euro par mois

Les critères d’accès officiels et leurs limites

L’accès au Fuggerei est strictement encadré par des règles héritées de sa création. Les candidats doivent prouver leur situation de précarité, résider à Augsbourg et accepter un mode de vie conforme aux exigences de la fondation.

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La sélection ne repose pas uniquement sur les revenus. Le comité d’admission évalue aussi la « respectabilité » des profils, un critère volontairement flou qui limite fortement l’accès au logement.

Dans les faits, très peu de personnes correspondent à l’ensemble des conditions. Les listes d’attente sont longues et les places rares, ce qui transforme ce village à 1 euro par mois en exception presque inaccessible.

Religion âge précarité des conditions toujours d’actualité

L’un des critères les plus discutés reste l’appartenance à la religion catholique. Les résidents s’engagent également à respecter une pratique spirituelle quotidienne, même si celle-ci n’est plus réellement contrôlée.

Le dispositif privilégie majoritairement des personnes âgées seules, au détriment des familles, des migrants ou des travailleurs pauvres. Cette sélection reflète une vision ancienne de la pauvreté.

Dans une société devenue pluraliste, ces conditions soulèvent un malaise croissant. Elles renforcent l’image d’un système stable, mais peu adapté à la diversité des situations sociales actuelles.

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Un modèle solidaire adapté ou dépassé face à la crise du logement

Entre entraide réelle et exclusion silencieuse

Sur place, la vie quotidienne est souvent décrite comme paisible. Les habitants bénéficient d’un environnement calme, de logements simples et d’une entraide de voisinage qui rend le lieu particulièrement attractif pour des personnes isolées.

Mais cette stabilité a un prix. L’accès repose sur des filtres stricts qui écartent une grande partie des profils aujourd’hui touchés par la précarité, notamment ceux qui ne correspondent pas aux critères religieux ou familiaux.

  • Avantage logement stable et loyer symbolique
  • Limite critères d’accès très restrictifs
  • Effet modèle admiré mais peu reproductible

Ce que ce village révèle sur la solidarité moderne

Le Fuggerei montre qu’un modèle privé peut maintenir un loyer quasi nul pendant des siècles grâce à une fondation et à des ressources touristiques. Cela prouve qu’une solidarité patrimoniale peut fonctionner sans dépendre des politiques publiques.

En revanche, la question centrale reste la même : qui mérite d’être aidé, et selon quelles règles. En période de crise du logement, un dispositif fermé peut sembler injuste, même s’il est cohérent avec la volonté initiale du donateur.

Ce village à 1 euro par mois agit donc comme un miroir. Il inspire par sa longévité, mais rappelle aussi qu’une solidarité conditionnelle peut devenir un frein majeur quand la société change plus vite que ses traditions.