Adopté par surprise à l’Assemblée, le nouvel impôt sur la fortune improductive relance le débat sur la taxation des patrimoines. Héritier élargi de l’IFI, il vise désormais certains actifs jugés « non productifs » comme l’or, les œuvres d’art ou certaines assurances-vie.
Qu’est-ce que l’impôt sur la fortune improductive
Origine et contexte politique
Proposé dans le cadre du budget 2026, ce nouvel impôt résulte d’un amendement porté par le Modem et soutenu par plusieurs groupes, dont le PS, le RN et Liot. Il transforme l’actuel IFI, créé en 2018, en un impôt plus large sur les patrimoines considérés comme peu utiles à l’économie. L’objectif affiché : taxer davantage la richesse dormante sans freiner l’investissement productif.
Cette alliance hétéroclite a surpris le gouvernement, qui s’y est opposé. En revanche, les partisans du texte y voient un rééquilibrage fiscal en faveur des ménages modestes et une réponse à la suppression de l’ISF en 2017, longtemps critiquée pour son effet symbolique.
Biens et placements concernés
L’impôt sur la fortune improductive conserve la base de l’IFI, mais y ajoute d’autres types d’actifs. Sont désormais visés : les biens de luxe (voitures de collection, yachts, avions privés), les objets précieux, l’or, les œuvres d’art, ou encore les actifs numériques tels que les cryptomonnaies. L’idée est de cibler les avoirs qui ne participent pas à la création de valeur réelle.
Autre nouveauté : certaines assurances-vie entrent dans le champ de l’imposition, notamment celles qui ne sont pas investies en unités de compte, donc jugées peu productives. Les contrats orientés vers les marchés financiers, eux, restent exclus de cette mesure.
Cette réforme marque un tournant dans la conception même de la fiscalité du patrimoine en France, en distinguant clairement ce qui est productif de ce qui ne l’est pas.
Les contribuables devront désormais surveiller la composition de leurs avoirs pour évaluer l’impact de cette évolution sur leur fiscalité en 2025.
Quelles sont les principales nouveautés du dispositif
Un taux unique à 1 % pour plus de simplicité
Le nouvel impôt abandonne le barème progressif de l’IFI, qui s’étendait de 0,5 % à 1,5 %, pour un taux unique fixé à 1 %. Selon les députés à l’origine du texte, cette simplification vise à rendre la fiscalité plus lisible et plus efficace. Tous les contribuables concernés seront donc imposés à un taux identique, quelle que soit la valeur de leur patrimoine imposable.
Cette mesure a pour but de limiter la complexité administrative et de faciliter les comparaisons entre les différents types d’actifs taxés. En revanche, certains experts redoutent un effet de seuil défavorable pour les patrimoines les moins élevés, qui pourraient être davantage touchés qu’auparavant.
L’exemption d’une résidence principale jusqu’à 1 million d’euros
Autre changement majeur : chaque foyer fiscal pourra désormais déduire une résidence principale d’une valeur maximale d’un million d’euros de l’assiette de l’impôt. Une mesure pensée pour protéger les ménages possédant un logement sans pour autant disposer d’une grande fortune.
Le seuil d’éligibilité à l’impôt reste fixé à 1,3 million d’euros de patrimoine net. Les députés avaient envisagé de le relever à 2 millions, mais la proposition a été rejetée. Cette stabilité du seuil, combinée à l’exemption partielle, devrait limiter la hausse du nombre de foyers imposables.
Ce dispositif témoigne d’une volonté d’équilibrer taxation et équité, en évitant de pénaliser la classe moyenne tout en élargissant l’imposition sur les avoirs non productifs.
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Pourquoi cette réforme divise les députés
Pour les uns, un “ISF rétabli”
Du côté du Parti socialiste, plusieurs élus se félicitent d’un retour symbolique de la justice fiscale. Selon eux, cet impôt réintroduit une forme d’équité entre les détenteurs de patrimoine immobilier et ceux d’actifs financiers. Le député Philippe Brun a salué un « rétablissement de l’ISF » supprimé en 2017 par Emmanuel Macron, y voyant un geste fort en faveur du pouvoir d’achat collectif.
Les partisans de la réforme défendent également une meilleure contribution des grandes fortunes au financement de la transition écologique et de la dette publique. L’impôt sur la fortune improductive est perçu comme un moyen d’encourager l’investissement dans l’économie réelle plutôt que dans les placements dormants.
Pour d’autres, une mesure “floue et risquée”
À l’inverse, les députés de la majorité dénoncent un texte mal calibré et potentiellement contre-productif. Pour eux, la nouvelle taxe crée une incertitude fiscale qui pourrait freiner l’épargne et décourager les investisseurs. La ministre des Comptes publics a rappelé qu’il n’existait « aucune certitude sur le rendement » de cette mesure.
Certains parlementaires y voient même un retour déguisé de l’ISF, susceptible de raviver les débats politiques de la précédente décennie. D’autres jugent le dispositif trop limité pour générer un véritable impact budgétaire. Une chose est sûre : ce nouvel impôt, encore en discussion au Parlement, ne laisse personne indifférent.
Son avenir dépendra désormais du vote final du projet de loi de finances, où il pourrait être amendé, voire supprimé, selon l’équilibre politique trouvé d’ici la fin de l’année.