L’immobilier fait face à une réalité souvent sous-estimée : l’impact des successions bloquées sur la vacance des logements. Les indivisions non résolues provoquent des retards importants, maintenant de nombreux biens inoccupés pendant des années. Une proposition de loi examinée à l’Assemblée nationale entend changer la donne.
Successions bloquées : un frein au logement
Quand un bien immobilier est hérité par plusieurs personnes, les décisions importantes doivent être prises d’un commun accord. Or, il suffit d’un désaccord ou de l’absence d’un héritier pour que la succession s’enlise. Ce blocage peut durer des années, parfois des décennies, laissant les logements vacants et parfois dégradés.
Dans un contexte de crise du logement, cette situation est devenue insupportable. Outre le gaspillage de ressources, ces biens inoccupés deviennent des cibles pour les squats, se dégradent ou nuisent au voisinage. Ils représentent aussi un frein à la remise sur le marché de logements disponibles.
Une réforme pour accélérer les décisions
Portée par les députés Louise Morel et Nicolas Turquois, la réforme vise à modifier l’article 815-5-1 du Code civil. Objectif : autoriser la vente d’un bien dès que les indivisaires détenant deux tiers des droits sont favorables, sans attendre l’accord unanime. Cette mesure permettrait de sortir plus rapidement de l’impasse.
La proposition inclut aussi la création d’une base de données sur les biens abandonnés. En identifiant ces logements figés, l’idée est de les réintégrer progressivement dans l’offre active, en évitant leur dégradation et en répondant aux besoins croissants de logement.
Des pouvoirs renforcés pour l’administration
Autre avancée majeure : la Direction nationale d’interventions domaniales pourrait intervenir plus facilement pour vendre un bien bloqué depuis plus de dix ans, notamment en cas de décès d’un héritier introuvable. Cette mesure donnerait à l’État les moyens d’agir plus efficacement tout en respectant les droits de propriété.
En libérant ces biens, la réforme pourrait relancer l’activité économique locale, réduire la vacance, et soutenir les collectivités dans la valorisation de leur patrimoine.
Une expérimentation inspirée du droit local
Certaines zones pourront tester un dispositif déjà existant en Alsace-Moselle, fondé sur des mécanismes de partage judiciaire. Plus souple, ce modèle vise une meilleure résolution des conflits successoraux, adaptée aux réalités locales.
Cette approche expérimentale pourrait préfigurer une harmonisation plus large à l’avenir.
Un enjeu humain autant qu’économique
Derrière chaque bien en indivision, il y a une famille, une histoire. Cette réforme ne vise pas seulement à rationaliser le foncier, mais à redonner vie à un patrimoine figé. En facilitant la sortie d’indivision, elle permettrait à de nombreuses familles de tourner la page, tout en apportant une réponse concrète à la crise du logement.
Si elle est adoptée, cette loi pourrait marquer un tournant dans la gestion des successions, avec des effets positifs à la fois sociaux, juridiques et immobiliers.