La récente adoption de la proposition de loi visant à réguler les meublés de tourisme, souvent associés aux plateformes telles qu’Airbnb, marque un tournant significatif dans le paysage immobilier français. Cette loi, désormais entérinée par l’Assemblée nationale après deux ans de débat intense, introduit plusieurs mesures destinées à équilibrer le marché locatif et à protéger les intérêts des différentes parties prenantes. Voici un décryptage des principales dispositions et leurs implications pour les propriétaires, les communes et les acteurs du tourisme.
Nouvelles obligations pour les loueurs de meublés de tourisme
Déclaration préalable obligatoire
L’une des mesures phares de cette réforme est l’obligation pour tous les propriétaires de meublés de tourisme de déclarer leur activité auprès d’un téléservice national.
Ce dispositif vise à améliorer la transparence et à permettre une meilleure régulation locale par les autorités compétentes. Les propriétaires devront se conformer à cette exigence avant de mettre leur bien en location.
Diagnostics de performance énergétique (DPE)
Pour contrer la concurrence perçue entre les locations de courte durée et celles de longue durée, les nouveaux meublés de tourisme devront désormais fournir un diagnostic de performance énergétique (DPE).
À partir de 2025, les propriétaires devront obtenir une étiquette minimale de F pour leur logement, puis E en 2028 et D en 2034. Cette mesure impose ainsi un standard énergétique élevé, similaire à celui requis pour les locations traditionnelles.
Pouvoirs accrus pour les maires et collectivités locales
Réduction du nombre de jours de location
Les maires disposeront dorénavant de la possibilité de réduire le nombre maximal de jours durant lesquels une résidence principale peut être louée comme meublé de tourisme, passant de 120 à 90 jours par an.
Cette flexibilité offerte aux communes répond à la nécessité de contrôler plus rigoureusement l’utilisation des logements dans des zones particulièrement touristiques ou tendues au niveau du marché locatif.
Changement d’usage facilité
Pour mieux gérer l’implantation des meublés de tourisme, toutes les communes auront désormais la capacité de demander une autorisation pour tout changement d’usage d’un bien immobilier destiné à devenir un meublé de tourisme.
En outre, l’élargissement de ce dispositif inclut dorénavant aussi les bureaux, permettant une gestion plus compréhensive de l’espace urbain.
Quotas et règlements de copropriété
Les municipalités peuvent mettre en place des quotas limitant le nombre de meublés de tourisme sur leur territoire entier ou sur certaines portions spécifiques.
De plus, les versions nouvelles ou modifiées des règlements de copropriété devront préciser explicitement si la location en meublé de tourisme est permise ou interdite.
Dans les copropriétés ayant déjà une clause d’occupation bourgeoise, la décision d’interdire les meublés de tourisme pourra être prise avec une majorité des deux tiers plutôt que l’unanimité.
Changements fiscaux pour les meublés de tourisme
Révision des abattements fiscaux
La nouvelle loi revoit également les conditions fiscales applicables aux meublés de tourisme. Les meublés non classés bénéficient désormais d’un abattement fiscal réduit de 50 à 30 %, avec un plafond fixé à 15 000 euros.
En revanche, les meublés classés et les chambres d’hôtes profitent encore d’un abattement de 50 %, bien qu’il s’agisse d’une réduction par rapport au taux précédent de 71 %, néanmoins applicable jusqu’à 77 700 euros.
Adapter la fiscalité pour encourager le classement
Ces réformes fiscales ont été saluées par les associations professionnelles du tourisme, telles que la Confédération des acteurs du tourisme et ADN Tourisme. Elles permettent à la fois de dissuader les investissements spéculatifs et d’encourager le classement des meublés de tourisme, un processus essentiel pour structurer et qualifier l’offre touristique de manière cohérente et professionnelle.
Impact sur le marché immobilier et les communautés locales
Accès au logement pour les résidents
Une des motivations principales derrière cette loi est de répondre à la crise du logement ressentie dans de nombreuses villes françaises.
L’augmentation rapide des meublés de tourisme a contribué à la raréfaction des offres de logement disponibles pour les familles, les étudiants et les travailleurs locaux.
En limitant le nombre de jours où les résidences principales peuvent être louées et en facilitant les preuves d’usages résidentiels, la loi cherche à rétablir un équilibre favorable aux habitants permanents.
Soutien aux ménages précaires et mobilité sociale
Le constat alarmant de l’accroissement des prix des loyers et de la diminution de l’offre de logements abordables motive ces ajustements législatifs.
Ils visent principalement à soutenir les ménages précaires et à garantir une certaine fluidité dans la disponibilité des logements pour ceux qui en ont grand besoin, notamment les étudiants et les travailleurs saisonniers.
Quoique controversée et très attendue, l’adoption de cette proposition de loi représente un effort concerté pour trouver un juste milieu entre le développement économique apporté par le tourisme et la protection des ressources immobilières locales.
Les propriétaires de meublés de tourisme, les élus locaux et les acteurs du secteur touristique devront naviguer dans ce nouveau cadre réglementaire tout en cherchant à maximiser les bénéfices pour leurs communautés respectives.